Man of Steel
Réalisé par Zack Snyder
Avec : Henry Cavill , Amy Adams, Kevin Costner, Michael Shannon et Diane Lane
Cette critique contient des éléments faisant partie de l'intrigue. Attention aux spoilers.
Annoncé comme LE film de super-héros depuis le succès critique et spectateur de The Dark Knight, Man of Steel sort sur nos écrans une semaine après le concurrent Star Trek, et surtout sept ans après la catastrophe Superman Returns. Warner Bros n’avait donc pas le droit à l’erreur et la production a décidé d’un reboot, à l’image de Batman Begins de Christopher Nolan. Ce dernier est d’ailleurs impliqué dans le projet en tant que scénariste et producteur. Le titre s’inspire directement du comics de John Byrne sorti en 1986, qui avait déjà dans l’idée de donner un nouveau souffle à la série. Pour ce projet ambitieux, les producteurs ont fait appel à Zack Snyder, désormais bien installé à Hollywood. Découvert avec Dawn of The Dead (L’armée des morts en France), le réalisateur avait ensuite explosé avec l’adaptation au cinéma de 300. Il impose alors son style très graphique alternant une esthétique soignée et des ralentis puissants, utilisé dans la plupart de ses films. Il réussit alors à marier parfaitement sa pâte avec un projet des plus ambitieux : l’adaptation du célèbre roman graphique Watchmen. Au vu de sa filmographie, il s’agit clairement de sa meilleure réalisation jusqu’ici. S’inspirant du découpage au millimètre du roman graphique, le film propose une esthétique merveilleuse, une relecture de l’histoire contemporaine et un traitement des super héros jusque-là inédit au cinéma, Watchmen est sans nul doute un des tout meilleurs films du genre réalisé à ce jour.
Mais revenons à notre homme de fer. Car après un Sucker Punch plutôt maladroit, le cinéaste s’attaque ici à une œuvre monstre. L'histoire débute sur krypton, alors que Jor-El (Russel Crowe) essaye de mettre en garde le conseil que le forage effectué sur la planète représente un grand danger. Le General Zod (Michael Shannon), chef des armées, essaye alors de prendre de force le contrôle de la planète pour remettre en selle cette nation en déclin. La manière forte n’est pas la façon de faire de Jor-El cependant, et prit dans le conflit, ce dernier fuit pour protéger sa famille, plus précisément son nouveau-né, Kal-El. Premier enfant né naturellement depuis longtemps - les naissances étant contrôlées et chaque enfant programmé – ce dernier représente un espoir inestimable pour son peuple. Alors que Krypton s'embrase dans un conflit interne, Jor-El et sa femme Lara décident d'envoyer leur enfant sur la planète Terre. Le coup d'État tourne court, Zod et ses dissidents sont condamnés à la prison éternelle sur un système éloigné. Cependant, la planète implose et les kryptoniens disparaissent, libérant ainsi le général et ses fidèles.
Après une scène d'introduction impressionnante, l’œuvre confronte rapidement Clark Kent à ses origines. Le film alterne entre des flash-back sporadiques éclairant les difficultés qu'a Clark à se faire une place plus il grandit. Cependant, cette période d'apprentissage est assez anecdotique et la découverte de ses pouvoirs n'est que vaguement traitée. Tout le monde connaît superman via les comics, les premiers films ou même la série télé Smallville. C'est donc une bonne chose que le film ne s'étende pas trop sur sa jeunesse afin de pouvoir mieux décrire l'adulte, tourmenté par le rôle qu'il a à jouer et la recherche de ses origines. On sent d'ailleurs la pâte de Christopher Nolan, adepte des orphelins torturés, pour fournir une vision plus adulte du personnage, sans pour autant nous emporter dans un tourbillon de tourments et questionnements. Cependant, on oscille entre conseils parentaux et discours un brin figé sur la maîtrise de soi et l'importance des pouvoirs surpuissants dont dispose le jeune homme. Le film manque de prendre un peu plus son temps afin d'asseoir quelques éléments du scénario (le vagabondage de Clark Kent) ou certains environnements (la découverte du vaisseau kryptonien en arctique).
Après quelques actes de bravoure formateurs, Clark Kent enfile alors rapidement son costume, mis au goût du jour afin de ne pas plomber le film d'un slip rouge totalement démodé. Le général Zod fait alors son apparition et passe un message à la terre : livrez-nous cet homme qui n'est pas des vôtres, sous peine de goûter à la puissance militaire made in krypton. Derrière cette requête se cache le désir de retrouver le codex, un crâne qui servait à créer tous les nouveau-nés sur la défunte planète, afin de faire renaître krypton de ses cendres.
Propulsé sous les projecteurs, Henry Cavill est plutôt convaincant sous les traits du super-héros, en suivant tranquillement le traitement de son personnage. Pour le reste du casting, les acteurs sont plutôt solides, mais les personnages manquent quelque peu de nuances et d'épaisseur pour que l'on s'attache vraiment à eux, indépendamment de la qualité des acteurs : Kevin Costner, Amy Adams, le très bon Michael Shannon et Laurence Fishburne, qui a visiblement totalement résilié son abonnement à la salle de sport. À la partition, Hans Zimmer a, comme à son habitude, respecté le cahier des charges hollywoodien. Je serai donc incapable de vous fredonner un des différents thèmes présents dans le film. La musique s'emporte dans de grandes fulgurances de quelques secondes avant de retomber rapidement en rythme avec les images. Souvent frustrant.
Alors que la première partie du film vise à l'exploration du personnage, la deuxième partie s'oriente vers quelque chose de bien différent. On assiste à un déluge de bastons monumentales et d'effets spéciaux aux quatre coins de l'écran. Même si le rythme est plutôt maîtrisé jusqu’après la moitié du film, l'orgie infographique prend malheureusement le pas au risque de finir par en ennuyer plus d'un. On pense alors rapidement à Avengers, en se demandant si DC et Warner, dans le but de rendre coup pour coup aux derniers Marvel, ne se sont pas laissé tenter à une surenchère d'action qui, pendant près d'une heure, viendra tout détruire sur son passage. Métropolis en prend d'ailleurs pour son grade, et la destruction de la ville ne laisse apparaître aucun cadavre humain, aussi nombreux qu'ils puissent être au vu des combats. Certains passages sont impressionnants, dynamiques et pleins de punch, mais au bout de la quinzième traversée d'immeuble, l'impact est moindre. Le film manque également d'un brin d'humour, et outre quelques bonnes trouvailles (Superman se rendant menotte en main dans sa salle d’interrogatoire pour que les humains soient plus « rassurés ») l'ensemble reste très sérieux.
De bonnes satisfactions cependant en ce qui concerne l'univers esthétique. Krypton a plutôt fière allure, et les vaisseaux et autres outils technologiques, sans verser dans une grande originalité, sont assez réussis. Les armures dont disposent Zod et ses soldats ont de la gueule et sa seconde en chef, Faora-Ul, est une de mes petites satisfactions dans le film avec, à mon grand étonnement, l'ami Russel Crowe. Le renouveau visuel de Superman est d'ailleurs convaincant, son nom n'est d'ailleurs prononcé que deux ou trois fois pendant le film. Le film termine cependant sur une note étonnante. Alors que ce reboot injecte de nouvelles idées et offre un conflit bien plus imposant qu'avec Lex Luthor, la scène finale, plutôt anecdotique, viendra nous rappeler aux bons pouvoirs magiques d'une paire de lunettes, capable de cacher le messie de toute une planète.
Au final, Man Of Steel est un film hybride, affichant de bonnes intentions et un fond intéressant avec un casting solide, capable du bon comme du pire. Lancé sur de bons rails, le film dérive en brisant un peu son postulat de base pour tourner en roue libre dans sa deuxième partie. Zack Snyder ne fait pas étendu de son talent, même avec un scénario signé Nolan. Après cet énième reboot, il serait vraiment temps pour Hollywood de se tourner vers d'autres interprétations des super-héros mythiques (Superman Red Son, par exemple) voire même vers d'autres romans graphiques dans la lignée de Watchmen. Si quelqu'un peut, un jour, adapter Martha Washington au grand écran, je me charge personnellement des lettres de remerciements.
Clément Panadero
